La charrue avant les bœufs de la CEDEAO

Publié le par GUILLAUME DELLOH

 

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L’image est très éloquente. Quand la charrue  est devant le bœuf qui devait la tirer afin de labourer la terre, à défaut de faire du surplace, on avance sans rien réaliser. Depuis le début de l’éclatement de cette affaire de putsch malien, on avait vu que la CEDEAO avait commencé à agir avec très peu de discernement.  Au lieu de chasser d’abord la junte, c’est le contraire qu’il aurait fallu mettre en évidence. D’abord, l’on nous dira que chaque pays en tant que membre a la latitude de diriger cette auguste institution. Soit, on le concède bien volontiers. Mais était-ce si urgent de choisir un novice qui cherche ses marques depuis à peine un an  qu’il est à la tête de son pays,  en proie à tant de problèmes ? Lorsque nous disons que le savoir-faire de M. Alassane Ouattara relève plus du mythe que de la réalité, beaucoup de gens pensent que c’est parce que nous n’aimons pas ce Monsieur que nous le vilipendons. Beaucoup parmi les chefs d’Etat de la communauté internationale qui l’ont adoubé, vont bientôt se rendre compte de leur mauvais jugement sur l’individu. Il a certes peut-être des qualités, mais sa réputation est souvent surfaite. En l’occurrence, il y a eu un coup d’Etat qui a déposé M. Amadou Toumani Touré dit ATT. Celui qui se prétend chef d’une institution telle que la CEDEAO, avant d’agir, se devait de chercher à savoir le mobile, donc étudier tous les paramètres pour connaître les tenants et les aboutissants de cette affaire. La presse nous a tous appris que le capitaine Sanogo se plaint de ce que l’Etat n’a pas mis suffisamment de moyens à la disposition de son armée, afin de bouter les rebelles Touareg hors du territoire malien. Dans ce cas, pour rétablir l’ordre constitutionnel  c’est,  ce qui reste du  semblant d’armée, qu’il faut venir renforcer pour combattre la rébellion d’abord. Et la négociation dont parlaient et les Américains et les putschistes,  serait de trouver un modus vivendi consistant pour la CEDEAO à aider à rétablir l’intégrité territoriale du Mali.  Mais une fois cet objectif atteint, la junte devra rentrer en caserne pour laisser la place à la légalité constitutionnelle. Le capitaine Sanogo a montré vainement la voie à suivre à M. Alassane Ouattara et consorts, mais rien à faire. Ils s’entêtent dans leur mauvais choix. Il faut punir absolument les Maliens… A. Ouattara  le conspirateur, était pourtant le mieux placé pour comprendre ses  collègues putschistes.

Pour notre part, le choix de la CEDEAO de désorganiser d’abord la junte,  et avant elle, la mise à genou du peuple malien, est une aberration. Comme les vampires de la CEDEAO n’aiment que le sang à commencer par leur président, il va falloir regarder couler le sang des pauvres Maliens avant de comprendre qu’il y a eu une grave erreur. Pourquoi ?

-Parce que la CEDEAO veut pousser le peuple à se rebeller contre la junte. Qui peut-il dire combien de personnes perdront la vie dans ce bras de fer  peuple-soldatesque ? Même  affaiblis, des soldats restent  des hommes armés. Ils ne comprennent que le langage des fusils, parce qu’ils ne sont pas faits pour la négociation avec des émeutiers…

-Parce que le peuple peut bien par patriotisme,  refuser de se faire dicter son comportement. Dans ce cas, s’il opte pour le soutien à la junte, quel sens politique la CEDEAO donnera-t-elle à son action ? Peut-on faire le bonheur de quelqu’un malgré lui ?

-Parce qu’entre le temps où la junte va rendre son tablier et celui de la pression, des difficultés qui vont faire plier le peuple, combien de dégâts seront-il à déplorer ? Personne ne peut le dire.

- Enfin parce qu’au moment où l’armée de la CEDEAO va se mettre en ordre de bataille pour chasser la rébellion, il faudra recourir à l’armée malienne. A l’évidence, on ne peut pas faire mal à une armée et vouloir en même temps en faire son allié objectif pour combattre des rebelles. (Spécialisés dans la guerre au désert). En tout cas,  la facture en moyens humains sera très salée, mais également celle des finances le sera davantage.

Or, il aurait été beaucoup plus simple de s’appuyer sur la structure,  quoique faible de ce qui reste en place comme armée, afin de créer une certaine confiance dans la reconquête des positions acquises par la rébellion, avant de chasser la junte du pouvoir. Là au moins, les militaires maliens à défaut de se maintenir au pouvoir, seraient bien contents  et avoir  l’impression d’avoir remporté  une victoire décisive : celle d’avoir défendu  leur pays et participé  à rétablir l’intégrité territoriale du Mali. Comme quoi, la violence ne règle pas tout, n’est-ce pas M. Ouattara ?

Louis-Freddy Aguisso

Infodabidjan.net

Publié dans Afrique

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