Tirs croisés contre le mandat de trop (Amadou Fall)

Publié le par GUILLAUME DELLOH

 

Tirs croisés contre le mandat de trop (Amadou Fall)
« Tout ce que le petit Maure vous dit, il l’aura appris sous la tente ».


Cette histoire comme on dit, je l’ai bien recueillie chez ma grand-mère Maure Trakha Mint Zeïdane Ould Babbaah un soir où certains d’entre nous désespéraient de la tournure que prenait la justice des hommes.

Un jour, me confia t-elle, l’ange Djibril descendit du ciel pour se mêler aux hommes. Il arriva en voyageur important dans la concession d’un vieillard pauvre mais très réputé pour son intégrité et pour sa foi en Dieu et lui dit :
« Je suis sur un long voyage ; j’ai confiance en vous et je voudrais vous confier ces 2 vaches. Si par bonheur, elles mettent bas pendant mon absence, la moitié du prix du lait serait votre rétribution jusqu’à mon retour.
L’homme accepta au nom de la confiance si généreusement placée en lui. Les années passèrent. D’autres passèrent encore. Et point de voyageur ; c’est comme si notre ange ne voulait plus revenir. Les bêtes constituaient maintenant un immense troupeau. La somme thésaurisée aussi devenait un joli pactole. Et la garde de tout cela devenait de plus en plus pesant pour notre vieil homme.
Un jour pourtant, l’ange revint. Le vieil homme s’empressa de lui présenter toute cette belle fortune. Mais l’ange lui dit : « ce n’est pas pour moi, je ne suis pas votre homme ! »
Devant autant d’incompréhensions et de tiraillements, ils décidèrent d’aller ester en justice.
Au premier tribunal, notre ange s’arrangea pour faire parvenir au magistrat une musette pleine de pierres précieuses. Le verdict fut très amer pour le vieil homme.
« Laissez le tranquille avait dit le juge sinon gare à vous. Reprenez vos bêtes et allez chercher ailleurs celui avec qui vous aviez traité l’affaire. Que peut faire un homme si important, si raffiné avec vos faméliques et sales bêtes ? »
Peu satisfait, l’homme décida d’aller se plaindre chez un second qaadi*. Là aussi, l’ange fit parvenir au juge une lettre où il lui faisait comprendre qu’il détenait sa petite famille en otage. Le verdict fut encore une fois défavorable au vieil homme.
Pourtant il alla courageusement se plaindre chez un troisième juge. Là -bas notre ange voulut placer comme à l’accoutumée ses présents et ses autres libéralités mais il se heurta à un mur, à un refus cinglant de la part du magistrat. Et le droit fut dit dans toute sa plénitude et dans toute sa beauté !
« Monsieur, un vieil homme aussi indigent ne cracherait sûrement pas sur autant de richesse s’il ne faisait preuve d’intégrité, de probité et de foi en Dieu. Reprenez vos bêtes et votre argent. Ayez pitié de ce vieillard qui veut retrouver la paix ; cette vie sobre et paisible que la garde de votre troupeau lui a interdit depuis de nombreuses années »
A ces mots, Djibril se leva, s’étira longuement, déploya majestueusement ses ailes et décréta avant de s’envoler aux cieux : « les magistrats rejugerons devant le Seigneur toutes les affaires qu’ils ont eu à trancher dans ce bas monde. En vérité, je vous le dis, les 2/3 de ces juges pâtirons de la colère de Dieu et constituerons de ce fait les bûches qui alimenterons la géhenne promise aux vils mécréants ».
Cette histoire constitue une parabole pour ceux qui veulent la comprendre ; elle est en vérité une allégorie dans son contenu ou chaque mot pèse son pesant d’or et une métaphore dans sa forme où chaque paragraphe illustre une vie, toute une vie. Car comme le dit l’adage wolof, « jùnj doyna boroom xel ». Elle interpelle encore plus que tous les 5 Sages du Conseil Constitutionnel auxquels Wade et ses grooms essaient maintenant de refiler la Patate Chaude, la responsabilité de valider la candidature à un troisième mandat.
Je n’ai aucunement la prétention de me substituer ou de me mesurer aux hommes de droit. Je ne suis ni Maître Serigne Khassim Toure ce juriste confirmé (Contribution/POP du 19/07/2011 ni le Professeur Babacar Guéye cet éminent constitutionnaliste ( POP du 24/07/2011). Mais je sais – au moins - lire un texte écrit en Français.
Si lire est d’abord faire du sens, une construction de sens , le seul sens que j’ai pu donner à ma lecture de notre Charte Nationale à propos de la Limitation des Mandats du Président est sans équivoque : Wade ne peut plus être candidat. Je voudrai que l’on relise attentivement l’Article 104 de la Constitution de 2011 qui dit ceci : « le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu'à terme. Toutes les autres dispositions de la Présente Constitution lui sont applicables ».
C’est aussi clair que de l’eau de roche.
Depuis 2001, dans ce pays on ne peut plus exercer plus de 02 mandats présidentiels.
Ceux qui tentent par une alchimie insipide de défendre le contraire, devront alors me montrer, me convaincre de la pertinence de la redondance du contenu de ce que je pourrai appeler Alinéa 1 (le Président en fonction poursuit son mandat jusqu’à terme), dans le futur, dans l’après Wade. A-t-on réellement besoin de légiférer sur l’évidence, d’inscrire sur une Constitution qu’un Président en fonction, régulièrement élu, a le droit de continuer son mandat jusqu’à terme ? Quel pléonasme ce serait alors !
Que l’on me dise, que l’on m’explique objectivement ce que peut signifier le groupe de mots, le groupe nominal « toutes les autres dispositions » dans ce que nous allons appeler l’alinéa 2 de l’article 104 de la Constitution de 2001 ?
Sinon qu’il y a deux idées, deux entités, deux parties distinctes qui cohabitent dans un même corps (la partie de le Constitution réservée au Président de la République) ou mieux, une mise en relief voulue – une première idée de faire coïncider, de synchroniser 5 à 7 - en premier lieu et qui viendrait compléter un autre corpus – une seconde idée exclusivement limitative - déjà existant. En termes plus clairs, au lieu de cinq ans Wade peut effectivement continuer son mandat (où 7 sera l’équivalant de 5) mais qu’ensuite le nombre de mandats est bien limité à deux de cinq ans chacun (Article 27 évoqué incognito par l’Alinéa 2 de l’Article 104). A vrai dire dans l’esprit du législateur, il y a eu plus de volonté de compenser, de ménager un Wade que l’on ne voulait aucunement léser (il pouvait continuer son mandat de 7 ans) que de volonté de clarifier à jamais un débat (limitation des mandants) sur lequel, personne – l’euphorie due à l’ivresse de l’alternance aidant - n’a pensé un seul instant que cela susciterait autant de passion dans un avenir des plus proches.
Le Conseil Constitutionnel est maintenant interpellé, mis au devant de la scène, pris pour le dernier coup de poker par les hypocrites du camp libéral et par tous les vils boucaniers, les terribles forbans, l’écœurante chienlit faite de pillards et de flibustiers qui lui sont affiliés. Dans une démocratie sérieuse, même les intentions les plus burlesques, les prétentions des plus invraisemblables ne sortent du cadre de la loi. Malgré tout, les libéraux affolés par un avenir politique incertain et casuel, attendent et poussent malicieusement le Conseil Constitutionnel à prendre le risque de s’aventurer à valider une candidature de trop.
Pendant ce temps, la majorité du Peuple gronde et clame haut et fort : Wade ne peut plus être candidat mieux, IL NE LR SERA PAS car on ne le lui permettra pas. Ceci n’est pas une menace contre qui que ce soit ; c’est tout juste ce que tout le monde pense en sourdine.
Jamais le Conseil Constitutionnel ne pourra se réfugier derrière une quelconque incompétence ; il devra lire le droit conformément à la volonté de l’écrasante majorité des citoyens de ce pays. Il n’y a de loi, de droit et de justice valables que ceux du Peuple Souverain. La vérité des Peuples unis et debout épouse celle de Dieu. Ainsi, il statuera comme le veut le Peuple dont les intérêts supérieurs dépassent de loin un nauséeux, un émétique et scélérat lobbying de quelques esprits tordus qui essaient de défendre contre vents et marées des prébendes et autres avantages inavouables. Parmi ces vomis de la Nation et de la République, il y a du tout : on y retrouve des Imans maudits, des Marabouts souillés, des hommes d’affaires pouilleux, des chefs d’entreprise maffieux et de soi-disant intellectuels malhonnêtes jusqu’au bout des ongles…..
Je suis sûr qu’aux Etats-Unis, en Angleterre et plus proche de nous encore au Cap-Vert, il ne viendrait jamais à l’esprit d’aucun citoyen (pire encore le Président) la sale besogne de rechercher les moyens tortueux et les interprétations fallacieuses, fourbes et zigzagantes des articles de la Charte Fondamentale pour trouver une quelconque faille afin d’asseoir la théorie du troisième mandat possible.
Quel est le magistrat qui prendrait la responsabilité de mettre ce pays en feu pour les beaux yeux d’un Wade décadent et de son pernicieux et nuisible clan d’ersatz insolents et incivils ?
Qui peut se valoir de connaître l’esprit de la loi mieux que son initiateur, son concepteur, son inspirateur ? Les 5 sages ont-ils le droit d’être plus royalistes que le roi ? Le « wax waxeet » a fini de départager d’entre les justes (Républicains) et les incrédules (monarchistes déguisés). Se dédire, faire des compromis de bas étage, user des carnations versatiles et des nuances volatiles dans le verbe et dans le geste pour s’accrocher infiniment au pouvoir, trahir cyniquement l’Esprit des lois et des Règlements et ensuite oser invectiver ou attaquer tous ceux qui vous apportent la réplique au nom du Peuple et de la République, je dis que le PDS et son mentor poussent le bouchon trop loin.
Si l’enregistrement sonore n’est pas une preuve chez nous alors nous aurons failli à notre culture négro-africaine qui repose essentiellement sur l’oral. La parole donnée est sacrée surtout celle du chef. Que dire maintenant si ce même chef est du troisième âge ?
Je disais que nous ne verserons point dans les menaces mais que le Peuple Souverain, a assurément le droit mais surtout le devoir de défendre la République, l’Esprit et la Lettre de sa Charte Fondamentale. En vérité, notre fibre patriotique ne battra que pour l’honneur de notre Nation, que pour le rayonnement de la République et pour la grandeur de notre Peuple.
Le « Nouveau Type Sénégalais » né de la fameuse et révolutionnaire journée du 23 Juin 2011 est sorti de la belle école, celle qui est faite de bon sens, de patriotisme et d’honneur républicain. Il est de ceux qui ont su faire coïncider en eux – dans la vie sociopolitique - la probité intellectuelle et la justesse du verbe et du geste. Ce NTS défendra au prix de sa vie son Pays, son Peuple et les atours de la République. Qu’on se le tienne pour dit !
Trêve de plaisanteries, la candidature de Wade est non seulement illégale et anticonstitutionnelle (il s’en est expliqué et s’en est interdit lui-même dans plusieurs de ses déclarations) mais encore, qu’elle constitue un grave danger, et pour notre cohésion sociale et pour la paix civile. Bref, la candidature Wade en 2012 est et doit être comptée comme un danger pour la cohésion nationale, un péril grave pour la République et une lourde menace pour la Démocratie !
L’exemple du Conseil Constitutionnel Ivoirien est là, encore vivace dans nos esprits. Nous ne voulons pas d’un Paul Yao Ndre chez nous car même si la case du prochain qui brûle ne peut constituer un spectacle réjouissant, elle doit donner matière à réflexion.
Jamais, nous ne laisserons la voie libre aux pyromanes, aux cascadeurs et autres gladiateurs et à tous ceux qui nous poussent inexorablement dans les pitoyables abysses de l’affrontement et de la discorde. Wade n’en vaut pas la chandelle.
* qaadi ou caadi = magistrat, juge
AMADOU FALL Enseignant à GUINGUINEO
TEL : 775457544/766887279
Zemaria64@yahoo.fr / zemazia64@hotmail.fr

Publié dans Sénégal

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